Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le blog de Marlene Hounkpatin
29 décembre 2011

Actualité de la jurisprudence SEPTFONDS

Grâce au précédent de la jurisprudence Septfonds, le juge judiciaire a obtenu une prorogation de compétence. Mais depuis un arrêt du Tribunal des Conflits du 17 octobre 2011, il en est effet désormais compétent pour connaitre de la légalité des actes administratifs. 

 

I/  La prorogation jurisprudentielle de compétence du juge civil

Au nom de la séparation des pouvoirs du fait de l’organisation judiciaire française, le juge civil ne pouvait connaitre des actes administratifs que ce soit pour une interprétation ou pour une appréciation de la légalité ; ces actions relevant de la seule compétence du juge administratif.

Quand bien même le juge civil serait saisi au principal d’une question qui relève de sa compétence et que le problème de l’interprétation ou de la légalité d’un acte administrative se pose à lui à titre incident, il devait se déclarer incompétent.

La connaissance d’un acte administratif par le juge civil mettait systématiquement en conflit, d’une part le principe « le juge du principal est le juge de l’exception », d’autre part le principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires.

Mais cette vision étroite ne pouvait demeurer dans la mesure où le travail quotidien du juge, tant administratif que civil, repose sur l’interprétation des normes juridiques. L’acte administratif, tout au moins l’acte administratif règlementaire constitue dans l’ordonnancement juridique une loi au sens large. Dès lors le juge civil pouvait l’interpréter.

 A cet égard, le Tribunal des conflits a eu l’occasion de définir les pouvoirs du juge judiciaire statuant en matière civil dans un arrêt du 16 juin 1923, Septfonds. Ainsi :

1)       L’interprétation lui est permise en ce qui concerne les actes règlementaires, mais celle des actes individuels- à moins qu’ils soient parfaitement clairs- constitue une question préjudicielle de la compétence de la juridiction administrative   

2)       L’appréciation de la légalité des actes administratifs par voie d’exception n’est jamais, en principe, de la compétence du juge civil



II/ Les deux nouvelles exceptions à la jurisprudence Septfonds

Depuis l’arrêt du 17 octobre 2011, le juge judiciaire peut désormais opérer un contrôle de légalité de l’acte administratif « lorsqu’il apparait manifestement, au vu d’une jurisprudence établie, que la contestation peut être accueillie par le juge saisi au principal ».

Ces nouvelles prérogatives accordées au juge judiciaire ne sont le fruit du hasard mais plutôt d’une évolution jurisprudentielle depuis l’arrêt Septfonds, lequel faisait l’objet au fil du temps de restrictions.

En effet dans la décision Septfonds en date du 16 juin 1923, le Tribunal des conflits, décidait de l’incompétence du juge civil pour connaître de la légalité d’un acte administratif. Ainsi, l’examen de la conformité d’un acte administratif réglementaire à une norme communautaire ne relevait pas de la compétence du juge judicaire (T. confl. 19 janv. 1998, Union française de l’Express et autres c. la Poste et autres ; T. confl. 23 oct. 2000 , Boussadar). En pratique, le juge judiciaire devait donc surseoir à statuer et saisir le juge administratif d’une question préjudicielle relative à la légalité de l’acte administratif contesté par voie d’exception sauf lorsque l’acte réglementaire portait une atteinte grave au droit de propriété ou à la liberté individuelle (T. confl. 30 oct. 1947, Barinstein), ou lorsque de l’examen d’un acte réglementaire dépendait la solution du procès pénal (art. 111-5 C. pén.) ou encore en matière de fiscalité indirecte (T. confl. 7 déc. 1998, District urbain de l’agglomération rennaise c. Société des Automobiles Citroën).

Néanmoins, la Cour de cassation, se fondant sur la primauté des principes du droit communautaire sur le droit national avait considéré que le juge judiciaire était compétent pour apprécier la validité d’un acte administratif au regard du droit communautaire (Com. 6 mai 1996, France Telecom c. Communication média service ; Soc. 18 déc. 2007 et Civ. 2e, 20 déc. 2007).

La nouvelle décision du tribunal des conflits n’est donc qu’une mise en conformité avec l’évolution jurisprudentielle.

Les faits relatifs à cette décision concernaient la contestation d’arrêtés ministériels pris en application des articles L. 632-3 et L. 632-12 du Code rural et de la pêche maritime ayant rendu obligatoires des cotisations interprofessionnelles volontaires. Des producteurs de porc et de lait avaient chacun saisi le juge judiciaire afin d’obtenir le remboursement de ces cotisations en soutenant que celles-ci auraient été exigées en application d’un régime d’aides d’État irrégulièrement institué, faute d’avoir été préalablement notifié à la Commission européenne en application des articles 107 et 108 du TFUE. Le préfet de la région Bretagne, préfet d’Ille-et-Vilaine, estimant que la question portait sur la légalité d’actes administratifs réglementaires au regard du droit de l’Union et appliquant la jurisprudence Septfonds, a alors présenté deux déclinatoires distincts afin que le juge judiciaire pose une question préjudicielle à la juridiction administrative concernant la légalité de ces arrêtés. Le juge judiciaire ayant refusé, le préfet, par arrêté en date du 9 mai 2011, a élevé le conflit. Le Tribunal, prenant en compte les évolutions jurisprudentielles, annule ces arrêtés de conflits et donne compétence au juge judiciaire pour apprécier la légalité des arrêtés litigieux au regard du droit de l’Union.

 

 Le juge civil obtient désormais donc le pouvoir d’écarter l’application d’un acte administratif lorsque son illégalité est manifeste. L’étendue de cette prérogative doit cependant être relativisée, puisque l’appréciation de la légalité de l’acte administratif ne pourra se faire que si une jurisprudence constante a établi auparavant l’illégalité de l’acte. Il ne s’agit donc pas d’un véritable contrôle de légalité des actes administratifs. Ainsi les conditions nécessaires à la compétence du juge pour connaitre de la légalité d’un acte administratif sont les suivantes :

1)       L’acte administratif doit être manifestement abusif

2)       L’acte ne peut être déclaré illégal que si une jurisprudence administrative constante l’avait auparavant fait.

 

En somme le domaine de définition de compétence du juge judiciaire en la matière est l’illégalité manifeste de l’acte et un précédent jurisprudentielle constant en la matière.

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Le blog de Marlene Hounkpatin
  • C'est un blog généralement consacré au Droit des Affaires et plus spécialement au droit africain. C'est aussi une compilation d'articles intéressants de divers auteurs. Tout ce qu'il faut pour un blog juridique complet.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
Publicité